BANQUE DE
DEVOIRS
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( Julie écrit une lettre à Saint-Preux ) De Julie, Je lavais trop prévu ; le temps du bonheur est passé comme un éclair ; celui des disgrâces commence, sans que rien maide à juger quand il finira. Tout malarme et me décourage ; une langueur mortelle sempare de mon âme ; sans sujet bien précis de pleurer, des pleurs involontaires séchappent de mes yeux ; je ne lis pas dans lavenir des maux inévitables ; mais je cultivais lespérance et la vois flétrir tous les jours. Que sert, hélas, darroser le feuillage quand larbre est coupé par le pied ? Je le sens, mon ami, le poids de labsence maccable. Je ne puis vivre sans toi, je le sens ; cest ce qui meffraye le plus. Je parcours cent fois le jour les lieux que nous habitions ensemble, et ne ty trouve jamais. Je tattends à ton heure ordinaire ; lheure passe et tu ne viens point. Tous les objets que japerçois me portent quelque idée de ta présence pour mavertir que je tai perdu. Tu nas point ce supplice affreux. Ton cur seul peut te dire que je te manque. Ah, si tu savais quel pire tourment cest de rester quand on se sépare, combien tu préférerais ton état au mien ? Encore si josais gémir ! si josais parler de mes peines, je me sentirais soulagée des maux dont je pourrais me plaindre. Mais hors quelques soupirs, il faut étouffer tous les autres ; il faut contenir mes larmes ; il faut sourire quand je me meurs. [ ]Plus ton souvenir me désole, plus jaime à me le rappeler. Dis-moi, mon ami, mon doux ami ! sens-tu combien un cur languissant est tendre, et combien la tristesse fait fermenter lamour ? Je voulais vous parler de mille choses ; mais[ ], il ne mest pas possible de continuer cette lettre dans létat où je me trouve en lécrivant. Adieu, mon Ami ; je quitte la plume, mais croyez que je ne vous quitte pas. Jean-Jacques ROUSSEAU, La Nouvelle Héloïse, I, 25 LES QUESTIONS:
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